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L’Autopilot sur le banc des accusés aux États-Unis : pourquoi ce nouveau procès pourrait être décisif pour Tesla

Un Autopilot qui n’a pas fonctionné correctement, et qui a entraîné de la mort d’une jeune femme : voilà l’argumentaire des proches de victimes d’un accident impliquant une Tesla. Ces derniers ont attaqué en justice le constructeur aux États-Unis : le procès, qui a débuté lundi 14 juillet, pourrait directement remettre en cause le système d’aide à la conduite de la marque de voiture électrique, alors que le groupe d’Elon Musk a lancé ses taxis sans conducteurs outre Atlantique.

L’Autopilot, ce système d’aide à la conduite de Tesla, a-t-il dysfonctionné, au point d’avoir entraîné un accident mortel ? C’est la question que devra trancher un tribunal fédéral de Miami dont l’audience a débuté lundi 14 juillet. Ce n’est pas la première fois que le constructeur de voitures électriques est attaqué en justice par des victimes ou leurs proches après un accident impliquant une Tesla. Mais cette fois, ce procès pourrait directement remettre en cause le système d’aide à la conduite de la marque de voiture électrique. Le timing tombe d’autant plus mal que l’entreprise, qui a vu ses ventes baisser après le passage d’Elon Musk dans l’administration Trump, a lancé ou est sur le point de lancer ses robotaxis, des taxis sans conducteurs, dans plusieurs villes outre Atlantique – avec des versions améliorées de cet Autopilot.

Dans cette affaire qui a eu lieu en 2019, un conducteur avait, en pleine nuit, enclenché l’Autopilot de sa Tesla Model S. Alors que la voiture roulait, l’homme au volant, au téléphone avec une compagnie aérienne, avait laissé tomber son téléphone portable. Sans s’arrêter, ce dernier s’était penché pour le ramasser. Au même moment, sa Tesla percutait un SUV qui stationnait à côté d’une intersection, ainsi que ses occupants – un couple observant les étoiles – qui se trouvaient à proximité du véhicule. La jeune femme a été tuée sur le coup, pendant que son petit ami a été grièvement blessé.

Pour Tesla : le conducteur était distrait par son téléphone portable

La famille du couple a alors attaqué en justice Tesla, devant un tribunal de Floride. Ils estiment que l’Autopilot n’a ni averti le conducteur de l’imminence de l’accident, ni réagi correctement face au panneau stop, le panneau étant situé juste avant la collision. Le freinage automatique d’urgence aurait aussi dû s’enclencher, y compris sans Autopilot, plaident-ils.

Pour les avocats des victimes, Tesla a aussi exagéré les capacités de l’Autopilot, encourageant un comportement dangereux des conducteurs. Depuis les premières commercialisations de ses Tesla, Elon Musk, à la tête de l’entreprise, laisse régulièrement entendre que les conducteurs de ses véhicules pourraient rouler sans conduire. En 2016, une vidéo, tweetée par le milliardaire, montrait une Tesla « se conduisant toute seule ». Mais cette dernière avait dans les faits commis plusieurs erreurs, avant de s’écraser contre une clôture, avait expliqué le directeur du logiciel Autopilot de Tesla, Ashok Elluswamy, en juillet 2022.

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Dans cette affaire, Tesla estime qu’il n’est en rien responsable de cet accident, car l’Autopilot ne contrôlait pas entièrement le véhicule, au moment de la collision. Le conducteur de la Tesla aurait appuyé sur l’accélérateur juste avant de percuter le SUV puis le jeune couple – une manœuvre qui désactive automatiquement le système d’aide à la conduite.

Tesla estime que « les preuves montrent clairement que cet accident n’a rien à voir avec la technologie Autopilot de Tesla ». « Au lieu de cela, comme tant d’accidents malheureux depuis l’invention des téléphones portables, cela a été causé par un conducteur distrait », ajoute l’entreprise américaine, dans un communiqué envoyé au New York Times.

Des vidéos détaillées stockées dans l’ordinateur de la voiture

Depuis 2019, des Tesla qui avaient actionné ce mode « autonome » (Autopilot ou FSD, la version améliorée) ont été impliquées dans une dizaine d’accidents, dont plusieurs mortels. Mais pour Tesla, le message est toujours le même : ce sont les « propres actes de négligence et/ou omissions » du conducteur qui sont à l’origine des accidents. L’Autopilot « nécessite une supervision active du conducteur et ne rend pas le véhicule autonome », explique le constructeur de voitures électriques.

Et jusqu’à présent, ce message a été entendu. Tesla est toujours parvenu à échapper aux condamnations pénales, aux États-Unis. Dans une affaire similaire, le constructeur a été jugé non responsable de la mort d’un propriétaire de Model 3 dont le véhicule s’était écrasé, alors qu’il roulait avec l’Autopilot enclenché. Même conclusion quand une conductrice a poursuivi l’entreprise d’Elon Musk lorsque son véhicule a heurté un terre-plein, alors qu’elle utilisait l’Autopilot. L’entreprise a toutefois été contrainte de procéder à plusieurs rappels, après une enquête fédérale sur des dizaines d’accidents impliquant des véhicules Tesla.

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Mais contrairement aux affaires précédentes, les victimes ont pu, cette fois, obtenir des images vidéo détaillées stockées dans l’ordinateur de la voiture. Selon nos confrères du New York Times, les images montrent que le système d’aide à la conduite a bien reconnu le SUV garé, un piéton et la fin de la chaussée, avant la collision.

Et si, pour nos confrères de The Verge, engager la responsabilité d’un constructeur automobile pour des victimes n’est pas une mince affaire en Floride –  il faut notamment prouver qu’en concevant et en commercialisant le véhicule, l’entreprise a fait preuve « d’un mépris pour la vie humaine équivalente à un homicide involontaire » – l’entreprise risque gros. Le juge a estimé en amont du procès que les plaignants pouvaient demander des dommages-intérêts punitifs à Tesla – des dédommagements qui peuvent monter à plusieurs millions de dollars dans le pays.

Mais avec son Autopilot directement visé par cette affaire, les conséquences pourraient être aussi bien plus importantes qu’un énorme chèque à régler. Une grande partie de la valeur boursière de Tesla repose en effet sur ses promesses de développer des véhicules à conduite autonome. Ces promesses pourront-elles encore être tenues, si le tribunal de Miami décide d’incriminer son système d’aide à la conduite ?

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