Le football français a sifflé le coup d’envoi de sa propre révolution. Face à un piratage devenu son « plus grand concurrent », la Ligue de Football Professionnel (LFP) a dégainé son arme maîtresse : Ligue 1+, une chaîne 100 % dédiée au championnat, conçue pour tacler à la gorge l’ogre de l’IPTV illégale. La stratégie ? Un prix d’appel fracassant et une politique de partage de compte si agressive qu’elle a des allures de déclaration de guerre. Mais cette offensive peut-elle vraiment faire basculer le match ?
L’arme fatale : un abonnement à 7,50 €… par personne
Au cœur du dispositif de la LFP, il y a un chiffre : 7,50 €. C’est le coût mensuel effectif de l’abonnement à Ligue 1+ pour quiconque décide de le partager. L’offre standard, à 14,99 € par mois (hors promotion de lancement), autorise en effet deux écrans en simultané, et la Ligue a fait savoir, après une communication pour le moins confuse, que cette possibilité n’était pas limitée au seul foyer.
Rappelons la séquence : le 11 juillet, le patron de LFP Media, Nicolas de Tavernost, assurait que le partage serait réservé aux membres d’un « même foyer ». Moins d’un mois plus tard, volte-face spectaculaire sur le compte X (ex-Twitter) de la chaîne, qui clarifiait qu’il n’y avait « pas de notion de foyer ». Un rétropédalage stratégique qui officialise la possibilité de diviser la note avec un ami, un voisin ou un cousin éloigné. L’objectif, à peine masqué, est de « ne pas inciter au piratage » en proposant un tarif qui se rapproche de celui des offres illégales.
Pour ce prix, l’abonné accède à huit des neuf matchs de chaque journée de Ligue 1, aux dix plus grandes affiches de la saison, et à une myriade de contenus exclusifs pour « recréer le feuilleton Ligue 1 ». Une promesse de qualité HD (1080p), de stabilité et, surtout, de totale légalité.
Le talon d’Achille : une offre spécialisée face au « tout-en-un » pirate
Aussi séduisante soit-elle, l’offre Ligue 1+ souffre d’une limite de taille : elle est incomplète. Le neuvième match de chaque journée reste l’apanage de beIN SPORTS, et l’abonnement ne donne accès à aucune autre compétition, qu’il s’agisse de la Ligue des champions ou des championnats étrangers. C’est là que l’IPTV illégale conserve son avantage le plus puissant : la promesse d’un accès total. Pour un tarif mensuel oscillant entre 3 et 10 euros, les services pirates proposent un catalogue quasi infini : tous les championnats de foot, tous les sports, les dernières sorties cinéma et les séries de toutes les plateformes de streaming. Pour le consommateur qui veut tout, tout de suite, la comparaison est vite faite.
Le coût caché du piratage : plus qu’une simple amende
Mais le prix affiché de l’IPTV cache une réalité bien plus sombre. Au-delà de la possible instabilité des flux, qui ont parfois tendance à couper lors des grands matchs, l’utilisateur s’expose à des risques bien réels. Sur le plan juridique, la consultation de flux pirates est un délit de recel de contrefaçon. Bien que la répression en France se focalise actuellement sur les « têtes de réseaux », les risques pour les utilisateurs finaux sont réels. En effet, ils risquent jusqu’à 300 000 euros d’amende et trois ans de prison. L’Arcom, qui a hérité des missions d’Hadopi, a d’ailleurs les moyens d’identifier ces utilisateurs.
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De plus, les risques de sécurité sont omniprésents. En s’abonnant à ces services non sécurisés, les utilisateurs exposent leurs données personnelles et bancaires à un risque élevé de vol et de revente. Certaines applications et boîtiers pirates sont également des nids à virus et malwares, capables d’infecter tout un réseau domestique.
Le verdict : une question de priorités et de tolérance au risque
En définitive, le match entre Ligue 1+ et l’IPTV se joue sur le terrain des priorités de chacun. Pour le supporter dont le cœur bat avant tout pour le championnat de France, et qui cherche une expérience de qualité, stable et sans risque, l’offre à 7,50 € (à deux) est une alternative plus que crédible. C’est le prix de la tranquillité.
Pour le « complétiste » qui veut un accès illimité à tous les contenus pour un coût minimal et qui est prêt à jouer avec le feu, l’IPTV conservera son attrait, du moins tant que les risques juridiques et sécuritaires lui sembleront lointains.
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La grande inconnue reste la durabilité de la stratégie de la LFP. Cette politique de partage très permissive ressemble fort à une offre de lancement pour attirer un maximum d’abonnés. Rien ne dit que, à l’instar de Netflix ou Disney+, la Ligue ne décidera pas à l’avenir de monétiser ou de restreindre plus sévèrement ce partage, une fois sa base de clients fidélisée.
Les petites lignes des conditions générales de vente, qui se réservent le droit de désactiver un compte en cas de « partage de compte ayant pour effet de faire bénéficier à un tiers en dehors du foyer », laissent d’ailleurs la porte ouverte à un futur tour de vis. L’aubaine actuelle pourrait donc n’être qu’une trêve temporaire dans la guerre sans merci pour le futur du streaming sportif.
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