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Le rachat de VMware par Broadcom, validé par Bruxelles, va finalement être jugé par la justice européenne

Ce jeudi 24 juillet, le CISPE, qui rassemble des fournisseurs de cloud européens, a déposé un recours devant le tribunal de l’Union européen. Il vise à faire annuler la validation, par la Commission européenne, du rachat de VMWare par Broadcom : une opération âprement décriée par de nombreuses entreprises qui déplorent des hausses de prix exorbitantes.

Après les lettres, les réunions et les communications avec la Commission européenne, l’action en justice : ce jeudi 24 juillet, l’association « Cloud Infrastructure Service Providers in Europe » (CISPE), un groupe de fournisseurs européens de services de cloud (l’informatique en nuage), a déposé un recours devant le tribunal de l’Union européenne (UE). Il vise à annuler la décision de la Commission Européenne qui a autorisé le rachat de VMware par Broadcom.

En juillet 2023, Bruxelles validait l’acquisition de VMware, une société qui commercialise des logiciels de virtualisation, par le géant américain Broadcom. Ces outils, très utilisés par les entreprises européennes, permettent de faire tourner les serveurs des infrastructures et de démultiplier le nombre d’ordinateurs. Depuis, le rachat a été âprement décrié par de nombreuses entreprises européennes et des politiques, pour plusieurs raisons.

Des hausses de prix drastiques, parfois multipliées par dix, selon le CISPE

À partir de novembre 2023, le nouveau propriétaire américain, qui a déboursé 61 milliards de dollars pour acquérir VMware, aurait imposé à ses clients (européens) « une forte augmentation des prix, le non-respect d’accords contractuels antérieurs, l’interdiction de la revente de licences (…) ainsi que le regroupement des licences, entraînant des coûts plus élevés », listaient les représentants de quatre associations européennes regroupant plus de 1 000 entreprises du secteur, dans une lettre adressée à la Commission européenne en avril 2024.

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Si ces « hausses de prix drastiques -parfois multipliées par dix  » sont déplorées par le CISPE, dans son communiqué du jour, la fronde aurait atteint son paroxysme début juillet. Depuis le début de l’été, « Broadcom a encore durci ses conditions en annonçant de nouvelles modalités de licence restrictives, susceptibles d’exclure les fournisseurs de cloud européens, parmi lesquels de nombreux membres de CISPE. Ces acteurs pourraient désormais être empêchés d’acheter et de revendre des services cloud basés sur VMware – pourtant cruciaux pour proposer des solutions cloud européennes, sécurisées et flexibles », écrit l’organisation européenne.

Les hôpitaux, universités et collectivités locales aussi touchés, selon le CISPE

Et si cela a mis en difficulté les fournisseurs de cloud européens, contraints de payer des augmentations décrites comme « soudaines et exorbitantes », d’autres entreprises ont été touchées, à l’image « des hôpitaux, des universités et des collectivités locales ». Ces derniers « sont désormais confrontés à des coûts insoutenables et à des engagements rigides de long terme, remettant en cause la flexibilité et l’accessibilité de leur infrastructure numérique », regrette Francisco Mingorance, secrétaire Général de CISPE, cité dans le communiqué.

Depuis 2022, les fournisseurs de cloud européens ont cherché à alerter Bruxelles à maintes reprises sur ce qui est décrit par le député Philippe Latombe comme un véritable « hold-up » sur l’économie européenne… Ce sans succès. De nombreuses entreprises sont dépendantes des logiciels de VMware, et les alternatives prennent du temps à être mises en place.

L’année dernière, les entreprises européennes demandaient justement à Bruxelles de débloquer « des moyens financiers pour développer ces alternatives. Il en existe, mais il faut les compléter et les développer pour leur permettre de passer à des échelles industrielles », notamment via un PIEC Cloud – un projet important d’intérêt européen commun, nous détaillait Henri d’Agrain un an plus tôt. Pour le délégué général du Cigref, il fallait alors « développer des outils permettant d’industrialiser la sortie de VMWare ».

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Un rachat validé par Bruxelles, sans mesure de soutien pour les fournisseurs de cloud, selon le CISPE

Or, « en dépit de nombreuses réunions et de réponses détaillées aux demandes d’information, aucune mesure concrète n’a été prise pour soutenir les fournisseurs européens de services cloud, ni leurs clients », déplore ce jeudi le CISPE. Si Bruxelles a bien reconnu qu’un tel rachat « présent(ait) des risques significatifs pour la concurrence », elle l’a bien validé sans émettre la moindre condition qui permettrait d’« éviter une concentration excessive de pouvoir ou pour atténuer les risques d’abus de position dominante », écrit l’organisation européenne dans son communiqué du jeudi 24 juillet.

Pour l’association qui compte dans ses membres Outscale, Numspot, Clever Cloud ou Ikoula, la décision de l’exécutif européen « est entachée d’erreurs de droit et d’évaluations erronées du point de vue de la concurrence, suffisamment graves pour justifier son annulation ». Depuis 2023, de nombreuses autorités se sont prononcées sur ce rachat, dont le Royaume-Uni, les États-Unis, la Corée du Sud, le Japon et la Chine.

Le tribunal de l’UE, situé au Luxembourg, devra désormais trancher cet épineux dossier : il pourrait contraindre l’exécutif européen à revoir sa décision d’approbation. Contactée par 01net.com, la Commission européenne explique ne pas avoir de commentaires spécifiques à nous partager. Mais « comme toujours, nous sommes prêts à défendre nos décisions devant les tribunaux », nous précise-t-elle. Broadcom, de son côté, « conteste fermement ces allégations. La Commission européenne, ainsi que douze autres juridictions à travers le monde, ont approuvé notre acquisition de VMware à l’issue d’un processus d’examen approfondi de (cette opération), et nous respecterons les engagements pris auprès de la Commission à ce moment-là ».

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Note de la rédaction : cet article publié ce jeudi 24 juillet a été modifié (dernier paragraphe) pour inclure le commentaire de Broadcom reçu après la publication initiale. 

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