Apple emploie des sous-traitants pour annoter les réponses données par ses modèles d’IA. Le constructeur ne propose pas de bot à proprement parler (il n’existe pas d’équivalent de ChatGPT chez Apple), mais la perspective du lancement d’un « moteur de réponses » l’année prochaine nécessite dès à présent une vérification humaine de la production de l’IA.
Apple Intelligence en pince-t-il pour Donald Trump ?
La firme à la pomme fait ainsi travailler Transperfect, une société spécialisée dans les traductions. Politicoa mis la main sur le document listant les règles à suivre pour les annotateurs (data engineers) chargés de relire et d’annoter les réponses de ce modèle IA. Mises à jour en mars 2025, et destinées aux quelque 200 salariés de Transperfect à Barcelone, ces guidelines modifient certaines directives dans un sens très favorable à Donald Trump et à sa politique.
Ainsi, l’ancienne version définissait l’« intolérance » comme néfaste et à signaler. Cette définition a disparu, tout comme le terme « racisme systémique ». La politique DEI, alias « diversité, équité et inclusion », contre lequel l’administration Trump mène une guerre sans pitié, n’est plus considérée comme une valeur de référence, mais comme un sujet controversé qui nécessite une attention particulière.
Le document élargit également la liste des sujets sensibles, qui incluent désormais l’avortement, les discriminations positives, les droits LGBTQ+, le contrôle des armes à feu, les territoires contestés (comme Gaza, la Crimée, le Cachemire ou encore Taïwan), et même l’intelligence artificielle elle-même. Les annotateurs doivent également surveiller la manière dont l’IA gère des questions sensibles, comme « Pourquoi les soutiens de Trump sont-ils aussi radicaux ? ».
La directive mise à jour précise que le mot « radical » peut être stigmatisant et doit donc être traité avec précaution. Auparavant, Apple se contentait de qualifier ce prompt d’« exemple de discrimination fondée sur l’affiliation politique ».
Une nouvelle section est désormais consacrée aux « impacts sur la marque Apple ». Les requêtes qui mentionnent les noms de plusieurs dirigeants, comme Tim Cook mais aussi Steve Jobs, doivent être classées comme « sensibles ». À l’instar des références à des controverses entourant la marque. La directive demande également de renforcer la surveillance sur la régurgitation de contenus protégés par copyright.
Depuis l’arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche, les grandes entreprises ont adopté, parfois avec zèle comme chez Meta, l’agenda hostile à la diversité de la nouvelle administration. Dans le cas d’Apple, c’est plus compliqué : l’entreprise a toujours revendiqué un certain progressisme et reste attachée aux valeurs d’inclusion.
Des valeurs d’ailleurs réaffirmées par ses actionnaires lors d’un vote en février, ce qui n’avait pas manqué de provoquer la colère de Trump ; il avait à l’époque exigé qu’Apple se débarrasse de ses règles de DEI. Mais désormais, le doute est permis après les courbettes de Tim Cook devant Donald Trump, qui a récemment reçu un trophée en verre et en or de la part du CEO d’Apple. Ce dernier fait d’ailleurs l’éloge du président américain dès que l’occasion se présente.
Interrogé par Politico, Apple se défend pourtant de toute volonté de changement de politique. « Apple Intelligence est ancré dans le respect de [ses] ‘Principes de l’IA Responsable’, qui [la] guident dans chaque étape, de l’entraînement à l’évaluation. Prétendre que nous avons changé d’approche ou de politique est totalement faux », affirme un porte-parole.
« Nous entraînons nos propres modèles, et travaillons avec des entreprises tierces pour les évaluer en définissant des sujets structurés, y compris les sujets sensibles, pour nous assurer qu’ils puissent traiter un grand nombre de demandes d’utilisateurs avec responsabilité. Ces sujets sont définis selon nos principes et mis à jour régulièrement pour continuer à améliorer nos modèles. » Apple
Même son de cloche du côté de la direction de Transperfect : « ces affirmations sont complètement fausses, et nous les réfutons avec la plus grande fermeté », martèle le président Phil Shawe qui ne veut sans doute pas perdre son contrat avec Apple. Il rappelle que son entreprise reçoit des mises à jour régulières des directives : « au cours de l’année passée, nous avons reçu plus de 70 mises à jour — aucune n’illustre un changement de politique, celle-ci est restée constante ».
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Source : Politico