Peut-on utiliser un exosquelette pour performer en course à pied ? En dehors de toute question éthique ou liée au dopage technologique qui méritent évidemment d’être posées, nous avons souhaité déjà répondre à la question initiale. Les exosquelettes, tels qu’ils existent actuellement, sont-ils faits pour la course ou le trail ? À quel point améliorent-ils les performances ?
En effet, si leurs fabricants, et le plus célèbre d’entre eux, Hypershell, communiquent allègrement sur l’intérêt d’un tel produit pour les personnes âgées, les sportifs en retour de blessure ou plus généralement pour quiconque aimerait reprendre une activité physique après une longue période d’inactivité, la réalité, c’est que la question de leur présence dans le sport se pose.

Ici, un coureur sur route qui teste leur efficacité sur la distance reine, le marathon. Là, un petit malin qui pensait décrocher un record sur Strava (KOM) avec ses jambes motorisées sans que la communauté s’en rende compte. Les exemples commencent à abonder, mais aucun ne s’attarde sur le fond de la question : quel est le gain réel pour un porteur d’exosquelette ?

Pour en avoir le cœur net, nous avons décidé de nous pencher sur la question et, non seulement de tester l’Hypershell Pro X, mais aussi de le faire tester par un coureur bien plus chevronné. C’est Aurélien Collet, ancien coureur de la team Hoka, quadruple vainqueur de l’UT4M et 3ᵉ de la diagonale des fous, qui s’est prêté au jeu et qui nous a accordé son éclairage sur ce gadget techno à part.
Nos tests, avec ou sans exosquelette, sur terrain plat ou en montée, avec ou contre Aurélien, nous ont permis de mieux quantifier l’apport de l’Hypershell Pro X et de déterminer s’il est adapté à la pratique de la course à pied.
L’exosquelette Hypershell c’est quoi ?
Avant d’aller plus avant et de s’attarder sur la façon dont nous avons testé l’exosquelette, il convient de s’arrêter quelque peu sur cet objet de fantasmes et d’en expliquer le fonctionnement et les promesses.
L’Hypershell Pro X est le résultat d’une campagne de financement sur Kickstarter. Il est important de noter que derrière ce projet, on retrouve quelques anciens de DJI, ce qui transparaît ici ou là dans la qualité de fabrication du produit ou encore sur l’application qui l’accompagne.

Concrètement, il s’agit d’une ceinture, comme celles que nous utilisons pour le maintien des lombaires, qui vient s’ajuster autour de notre taille. La différence avec la ceinture que vous trouverez en pharmacie ? L’Hypershell Pro X se poursuit avec deux bras mécaniques qui viennent se poser sur les cuisses et qui se terminent par des sangles. À la jonction des bras et de la ceinture, on retrouve de part et d’autre de la hanche deux petits moteurs. Ce sont eux qui vont accompagner le mouvement des jambes et faciliter l’effort.
L’ensemble pèse à peine 2 kg (1,8 kg dans sa version carbone), auxquels il faut ajouter 400 g de batterie à l’arrière.
Côté fiche technique et promesse produit, c’est très alléchant, notamment du côté de la puissance. Hypershell annonce 800 W sur son exosquelette, soit l’équivalent d’un cheval-vapeur, mais aussi 32 Nm de couple (l’équivalent d’un petit VAE urbain), le tout directement accroché aux jambes. Ainsi, l’exosquelette permettrait de déployer 40 % de force en plus dans les jambes et d’économiser l’équivalent de 30 % d’effort physique.

Enfin, l’IA n’étant jamais très loin d’une fiche technique ces temps-ci, le fabricant du dispositif explique utiliser l’intelligence artificielle (IA Motion Engine) pour traduire les différentes données récoltées par l’appareil et améliorer l’assistance. Plus probablement, il s’agit d’un algorithme capable d’analyser la data transmise par les capteurs de la ceinture, pour fournir une réponse adaptée au terrain et à la cadence de l’utilisateur.
Notre test : coureur vs machine
Afin d’en savoir plus sur les capacités de l’Hypershell Pro X, nous avons décidé de comparer nos performances avec et sans exosquelette, seul ou contre notre coureur de trail de référence, et enfin de lui confier le gadget pour une utilisation plus poussée.
Les tests se sont effectués en extérieur et en forêt, d’abord sur un terrain relativement plat (autour d’un lac), puis sur l’un des segments les plus pentus de la forêt de Montmorency.
À chaque fois, le déroulé des tests était le suivant :
- Un premier tour sans aide extérieure : amateur vs coureur pro (afin de mesurer l’écart réel)
- Un second tour « homme vs machine », où, équipés de l’Hypershell nous avons affronté Aurélien
- Un troisième essai (et quelques autres) où notre invité était équipé de l’exosquelette.
Afin d’avoir un aperçu du déroulé de cet essai, nous vous conseillons vivement de regarder la vidéo du test qui sera bien plus parlante que notre compte-rendu.

Plus efficace sur la pente que sur le plat
Après cette séance de test, plusieurs enseignements sautent aux yeux. Le premier est que l’apport de l’exosquelette est plus frappant sur un terrain pentu que sur du plat. Tout comme Aurélien, nous n’avons pas pu améliorer notre vitesse de pointe avec l’Hypershell Pro X sur le tour du lac.
L’exosquelette ne nous a pas permis d’être plus rapides, mais nous avons pu constater, comme Aurélien Collet, que l’effort nécessaire pour atteindre et maintenir cette vitesse max était moins important que lors de notre tour classique. Autrement dit, l’assistance porte sur l’effort mais n’augmente pas immédiatement la performance.
Lorsqu’on rajoute du dénivelé, le constat est nettement plus flagrant. L’aide est immédiate, dès le début de la difficulté, on se sent plus léger et aidé dans son mouvement. Si notre segment de 310 m à 11 % a pu être couru plus rapidement, c’est sur les parties les plus accidentées (environ 20 %) que l’exosquelette nous a le plus aidés. Ainsi, notre traileur est parvenu à gagner 12 secondes entre deux essais (avec ou sans exosquelette) sur cette portion.
En descente, le dispositif s’est avéré moins utile, compliquant même les moments où il fallait ralentir la cadence.

En définitive, l’apport de l’exosquelette est assez important et même s’il n’a pas effacé l’écart de niveau qui existait entre les deux coureurs, il est parvenu à le réduire de manière significative sur les portions en montée. Lors de notre test, nous avons fait jeu égal avec Aurélien sur la première partie de la pente avant de craquer sur la fin et de lâcher une quinzaine de mètres. Sur ce point, l’Hypershell Pro X s’est révélé bluffant.
Quelle autonomie ?
S’il peut permettre de faire illusion le temps de quelques segments Strava, l’exosquelette reste encore limité sur un trail en raison de son autonomie. Le fabricant annonce quelque 17,5 km d’autonomie, mais cette mesure est donnée en mode éco, à 4 km/h. Dans les faits, la batterie de 5 000 mAh est l’une des limites du dispositif. En mode « Hyper », équivalent d’une assistance « Turbo », elle nous a permis de parcourir un peu plus de 7 km. Bien entendu, dès lors qu’on ajoute du dénivelé, cette valeur baisse. C’est la raison pour laquelle le fabricant ajoute une seconde batterie dans la boite de l’Hypershell. C’est louable, mais ça ne retire pas l’autre souci lié à l’autonomie : il n’est pas possible de recharger sa batterie en dehors de la ceinture. Ou plutôt, il n’est possible de le faire que si on achète un dongle sur le site du fabricant. Il faudra donc immobiliser l’exosquelette pendant 1 h 30 pour chaque recharge complète. Autre solution, acheter plusieurs batteries, mais il vous coûtera 120 € l’unité.
Un accessoire de course à pied, vraiment ?
En l’état, et c’est heureux, l’exosquelette d’Hypershell n’est pas vraiment compatible avec la course à pied ou le trail. Certes, il est possible de courir avec, son poids et son fonctionnement ne limitent pas les mouvements, mais son autonomie limitée le contraint à un usage très spécifique. Fort heureusement, même s’il reste discret, il n’est pas aisé à cacher sous un short et un t-shirt. Tricheurs, vous pouvez passer votre chemin… ou attendre une future miniaturisation. Alors que reste-t-il ? Tout simplement les faits. Le constat que cette aide théorique d’un cheval vapeur a des conséquences réelles lorsqu’elle est appliquée aux jambes, notamment lorsque le terrain s’élève.
L’Hypershell Pro X n’est donc pas vraiment un accessoire de sport. Il nous parait peu probable de le voir un jour sur un ultra trail et c’est tant mieux, mais il n’en demeure pas moins bluffant par ses performances et utile dans d’autres situations.
À qui se destine l’exosquelette Hypershell Pro X ?
Amusant, mais limité dans un usage sportif, l’exosquelette répond en revanche parfaitement à sa mission première, celle d’accompagner sur le terrain une reprise d’activité des personnes qui auraient de grandes difficultés à le faire.
Pour les personnes âgées, en surpoids, en reprise d’activité physique ou souffrant d’un léger handicap, l’Hypershell Pro X, répond effectivement à cette problématique et peut s’avérer utile pour accompagner à la reprise d’activité ou simplement augmenter son rayon d’action.
Pour cela, il faudra tout de même consentir à un investissement relativement important. L’exosquelette d’Hypershell existe en trois déclinaisons :
- Une version classique, mais quelque peu limitée en termes de puissance à 999 euros
- Notre version d’essai, l’Hypershell Pro X, à 1199 euros
- Une version carbone identique techniquement à la précédente à 1799 euros.
Si l’exosquelette vous intéresse, nous vous conseillons vivement la seconde version, celle que nous avons testée et qui nous semble offrir le meilleur rapport qualité/prix.
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