Loin de nous l’idée de nous plaindre, mais la vie de testeur de smartphones peut se montrer monotone. La plupart des terminaux sur le marché se ressemblent beaucoup, et dénicher leurs subtiles différences peut parfois s’avérer complexe et peu passionnant. Mais, parfois, un constructeur propose quelque chose de réellement différent qui permet de rallumer la flamme. C’est assurément le cas de Fairphone, qui nous revient avec un Fairphone 6 toujours unique sur le marché.
Conçu pour respecter l’environnement avec des matériaux recyclés et équitables, pensé pour être aisément réparé au fil des années grâce à son design modulaire et doté d’un suivi logiciel massif, ce smartphone se destine à celles et ceux qui n’ont pas peur de l’engagement et qui en ont assez de changer de smartphones tous les 2 ou 3 ans. Sur le papier, acheter un Fairphone aujourd’hui c’est le conserver au moins le double d’un smartphone classique. Mais cette nouvelle déclinaison a-t-elle ce qu’il faut pour convaincre de réaliser cet investissement ? La question se pose étant donné le prix demandé et le test positif mais mitigé du Fairphone 5. Voyons cela.
Prix et disponibilité du Fairphone 6
Le Fairphone 6 est proposé à 600 euros en blanc, vert ou noir sur le site du constructeur et chez de nombreux revendeurs. Sa configuration interne est unique : 256 Go de stockage (extensible via microSD) et 8 Go de RAM. Si le prix peut paraitre élevé, c’est tout de même 100 euros de moins que le modèle précédent. Un bon premier point.
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eBayDesign : une vraie philosophie et plusieurs particularités
Dès le premier coup d’œil, impossible de ne pas voir que le Fairphone 6 ne veut pas faire comme les autres, quitte à diviser. Entre son corps tout en plastique doux malgré son prix élevé (quand la version précédente arborait un peu d’aluminium), la présence des boutons de volume sur la tranche gauche quand toute la concurrence est à droite, ou encore son bouton jaune coulissant (le bouton Fairphone Moments dont nous parlerons plus bas) à droite à côté du bouton plat d’alimentation/lecteur d’empreintes digitales, le smartphone peut demander un petit temps d’adaptation. Durant notre test, nous avons par exemple pris plusieurs captures d’écran involontaires en appuyant par mégarde sur le bouton de volume inférieur tout en appuyant sur le bouton d’alimentation…
Rappelons si cela est nécessaire que ce terminal est après tout conçu pour être aisément ouvert (via deux vis au dos) et réparé soit même à l’aide de pièces détachées en retirant simplement des vis. L’objectif est d’en augmenter au maximum la durée de vie en remplaçant des éléments plutôt qu’en jetant l’ensemble.
Outre des vis de rechange et un tournevis iFixit, 12 pièces changeables sont vendues par Fairphone sur son site :
- Écran : 100 euros
- Batterie : 40 euros
- Unité supérieure : 40 euros
- Appareil photo principal : 70 euros
- Appareil photo ultra grand-angle : 45 euros
- Appareil photo avant : 35 euros
- Coque supérieure : 10 euros
- Coque inférieure : 15 euros
- Tiroir carte SIM : 8 euros
- Port USB-C : 20 euros
- Haut-parleur : 25 euros
- Écouteur : 20 euros
De plus, l’autre grosse spécificité du terminal repose dans la possibilité de lui adjoindre aisément des accessoires officiels : coque, porte-cartes, cordon et bague. Un plus pour les amateurs de personnalisation et de simplicité, puisque cela passe également par son aisé système de vis. Nu, le smartphone est très agréable en main malgré ses angles assez prononcés et évite de se montrer trop épais (un raisonnable 9,6 mm) et lourd (193 g) malgré sa particularité de démontage. Il y a plus fin et léger sur le marché, mais c’est un faible prix à payer pour gagner en réparabilité.
En revanche, la conception modulaire du Fairphone 6 le condamne à n’être certifié “que” IP55. Il n’est donc pas totalement étanche, notamment à l’eau. Pas de souci pour la pluie, mais on évitera de le faire tomber dans l’eau. Pour finir sur la question du design, la tranche inférieur regroupe le port USB-C, le tiroir SIM et une grille de haut-parleur.
Performances : enfin un vrai SoC
Si certains ont pu reprocher au Fairphone 5 de manquer un peu de puissance et de modernité, le constructeur a ici fait un vrai effort en choisissant de miser sur le très récent SoC Snapdragon 7S Gen 3. Plutôt performante, la puce permet de naviguer avec fluidité au quotidien dans ses applications, et ce malgré la présence de “seulement” 8 Go de RAM pour l’épauler. Reste à voir si ce constat positif durera au fil des mises à jour et de l’usure.
Côté jeu vidéo, le GPU Adreno 810 n’a pas à rougir lui non plus et permet de faire tourner des titres gourmands dans de bonnes conditions. Il est possible de ne pas trop avoir à choisir entre qualité graphique et fluidité, les deux pouvant être atteint sur des jeux comme Genshin Impact. Dans ce dernier, jouer en élevé à 60 FPS est tout à fait envisageable. Dans l’ensemble, grâce à sa bonne optimisation (et à sa faible chauffe), le Fairphone 6 propose peu ou prou les mêmes performances qu’un Samsung Galaxy A56. Il ne s’agit donc pas d’un terminal orienté jeux vidéo gourmands et compétitifs, mais la vaste majorité des joueurs s’y retrouveront.
Évidemment compatible 5G, le Fairphone 6 embrasse également des versions récentes pour ses puces Bluetooth (5.4) et WiFi (6). Le lecteur d’empreintes digitales est, à défaut de se trouver sous l’écran, réactif.
Autonomie : solide, mais de la place pour encore mieux
Pour cette itération, Fairphone a aussi amélioré les choses côté autonomie. La batterie gonfle un peu à 4415 mAh. Cette valeur reste sous la barre des 5000 mAh que beaucoup passent aujourd’hui, mais cela permet malgré tout grâce à une bonne optimisation de tenir presque 17h avec notre test d’autonomie maison. Dans la pratique, le Fairphone 6 peut tenir une bonne journée lors d’une utilisation classique (un peu de navigation, de vidéos, de réseau sociaux et de mélange WiFi/5G). Suffisant donc, mais moins bien que d’autres terminaux dans cette tranche de prix. Cas concret : comptez environ 4 % d’autonomie pour regarder un épisode de série sur Netflix en WiFi.
Ce constat positif mais perfectible est identique concernant la recharge rapide, assurée par une compatibilité assez faible de 30W. De quoi retrouver 100 % d’autonomie en 1 h 26, tandis qu’un confortable 24% est atteint en 10 minutes. Pas de quoi bousculer les plus véloces du marché, mais tout à fait satisfaisant pour le commun des mortels.
Écran : une excellente dalle avec un petit défaut
L’écran du Fairphone 5 était déjà une belle évolution par rapport à celui du Fairphone 4. Pourtant, le constructeur ne s’est pas reposé sur ses lauriers pour le 6, qui fait un nouveau bond en avant. Place à une dalle de 6,3 pouces LTPO OLED (2484 x 1116), capable de monter cette fois jusqu’à 120 Hz. Le tout est protégé par du verre Gorilla Glass 7i. Autre bon point : cette dalle est extrêmement bien calibrée. En sRGB comme en P3, nous sommes sous la valeur de 3 (respectivement 2,87 et 0,74), valeur où l’œil humain peut commencer à faire la différence au niveau de la fidélité des couleurs. Rares sont les terminaux à proposer cette cohérence avec la réalité.
Ombre au tableau cependant, le taux d’occupation de la dalle n’est que de 84 % et les bordures noires sur les côtés sont difficiles à manquer. De même, la luminosité maximum captée par notre sonde n’est que de 1501 cd/m². C’est assez faible, notamment pour bien voir son écran en plein soleil. Reste que la solution reste parfaitement utilisable et fluide en étant à *ça* de la perfection.
Audio : tout juste de l’appoint
Comme précédemment, Fairphone assure l’essentiel côté audio. Le haut-parleur du bas se montre un peu plus puissant que celui du haut (qui ne profite pas de grille de sortie), ce qui n’empêche pas de produire un son stéréo utilisable. La puissance maximum reste raisonnable pour éviter de trop saturer, mais les aigus et les basses sont très peu présents. En bref, de quoi écouter correctement une vidéo dans un environnement calme, mais pas de quoi profiter au mieux de sa musique. Sans surprise, pas de trace de prise jack.
Photo : du mieux de jour, mais ça pique de nuit
L’une des principales faiblesses des modèles précédents est assurément la photo. Pour cette version 6, Fairphone a, sur le papier, fait un effort. Au dos, on trouve ainsi un capteur principal Sony de 50 Mpx avec objectif grand-angle ouvrant à f/1,88 et OIS, un ultra grand-angle de 13 Mpx (f/2,2), et un capteur de profondeur conçu pour améliorer la gestion des effets de flou d’arrière-plan.
Le plus gros des améliorations se voit de jouer avec le capteur grand-angle. Le niveau de détails est bon, la colorimétrie très proche de la réalité et la gestion des contrastes, même avec le soleil de face, est plutôt bonne. Le Fairphone 6 permet également de zoomer un petit peu, mais il ne faudra pas dépasser le x4 sous peine de perdre rapidement en détails. En l’absence de téléobjectif, impossible de monter au-delà de x10 de toute façon.
L’ultra grand-angle quant à lui s’en sort avec les honneurs mais arbore le même défaut que bien des concurrents, à savoir une légère perte de détails et une distorsion de l’image sur les bords (voir les feuillages ci-dessus). La colorimétrie est un peu différente de celle du grand-angle (parfois plus fade, parfois plus marquée selon les couleurs), mais rien de véritablement dramatique.
S’il s’en sort plutôt bien de jour, le Fairphone 6 n’est clairement pas un oiseau de nuit. Lorsque la lumière artificielle est présente le capteur parvient à se débrouiller, quitte à ne pas toujours restituer les bonnes couleurs. Nos photos de bâtiments de nuits sont beaucoup plus claires que dans la réalité, ou le jaune est en réalité proche du orange.
Dès que les conditions ne sont pas idéales en revanche, attention aux photos floues et à la perte immédiate de précision, aussi bien avec le grand-angle qu’avec, surtout, l’ultra grand-angle. Sans grande surprise, ces défauts s’accentue à mesure que l’on zoome. Le mode Super Nuit proposé par le constructeur n’a semblé quant à lui pas changer grand-chose durant nos tests, en dehors d’un temps de capture supérieur. Point de miracle nocturne donc, et assurez-vous bien que vos clichés sont nets lors de la prise.
En façade enfin Fairphone propose un assez généreux capteur de 32 Mpx. Celui-ci fait son travail, mais il reste de la place pour des améliorations. On relèvera par exemple que certaines textures sont un peu lisses et manquent de détails (grain de la peau, barbe…) et que le floutage en mode portrait, efficace nonobstant, n’est pas tendre avec les poils de barbe.
Concernant la vidéo, nous sommes en présence de quelque chose de classique, puisque le Fairphone 6 peut filmer jusqu’en 4K à 30 FPS ou 1080p à 60 FPS. Le capteur principal profite ici toujours de la stabilisation optique bienvenue.
Relevons enfin que si le smartphone se garde de succomber comme la concurrence à l’IA partout, le Fairphone 6 propose malgré tout une gomme magique.
Logiciel : Android dans le quasi plus simple appareil
Le Fairphone 6 est propulsé pour sa sortie par Android 15. Point de surcouche envahissante ou pleine de bloatwares ici, l’expérience est aussi proche d’un Android stock que possible. Il ne s’y trouve donc que l’application Fairphone pour notamment suivre l’état de son terminal et savoir comment changer des pièces.
Comme dit en introduction, le Fairphone 6 propose également un bouton lié à une fonctionnalité baptisée Fairphone Moments. Lorsque coulissé, celui-ci permet d’afficher, à la place de l’interface d’Android, une interface minimaliste ne proposant que quelques raccourcis purement textuels vers une poignée d’applications (le profil par défaut : appareil photo, Chrome, Maps, Messages, Téléphone). De quoi gagner en concentration et déconnecter un peu lorsque cela est nécessaire. Il est possible de créer d’autres profils ou de carrément changer le raccourci lié à ce switch physique pour qui n’en aurait pas l’utilité. Plus utile que bien des boutons bonus proposés par d’autres smartphones, à notre humble avis.
Cette sobriété de l’OS du Fairphone 6 est une bonne nouvelle pour celles et ceux qui aiment la simplicité, mais moins pour qui aime la personnalisation. Les options pour modifier l’apparence et l’organisation d’Android sont très peu nombreuses et on en vient notamment à regretter l’absence d’un vrai volet pour les notifications et les raccourcis. L’essentiel est là heureusement (y compris du Always On), mais c’est un élément à connaître étant donné que ce téléphone est conçu pour être gardé longtemps : 8 ans de mises à jour et 5 ans de garantie sont de la partie. Un record même aujourd’hui quand bien des constructeurs promettent plusieurs années de mises à jour.
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